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Travailler sans point de vente, une façon de réduire l’investissement et les frais fixes tout en gagnant en productivité

Mandat immobilier, agence immobilière en ligne, diagnostic immobilier, courtier en travaux ou en financement, assistance et dépannage informatique, conseil aux entreprises… Des concepts de franchise que l’on peut exercer sans local dédié et à domicile émergent dans différents secteurs, et notamment dans celui des services aux entreprises ou aux particuliers. Mais pour qu’une telle activité marche, il faut mettre l’accent sur la communication et être prêt à démarcher les clients.


“Seul chez moi, j’ai la satisfaction d’avancer avec une bien meilleure productivité, s’enthousiasme Jimmy Béteau. En une heure depuis mon domicile, je réussis à faire le travail que je fais en trois heures dans un espace de coworking.” Installé dans la banlieue de Toulouse, il a lancé son activité de coaching d’affaires avec le réseau américain ActionCoach en mai 2010. Ayant transformé une pièce en bureau dédié, Jimmy Béteau s’est installé à son domicile. “Ainsi, je ne suis pas gêné par la vie de famille ou les bruits de la maison.” L’enseigne Raison Home, spécialisée dans les projets d’aménagement d’intérieur sur mesure, développée en franchise en 2000, se félicite de ne compter que des franchisés qui travaillent de chez eux. “Ayant une plus grande liberté d’action, ils peuvent faire preuve de plus d’agilité, soutient Jean-Charles Pédrono, responsable développement, formation et satisfaction au sein de l’enseigne. S’ils ont envie de faire une partie de golf le jeudi après-midi ou de rendre visite à un client en soirée, ils sont libres d’organiser leur temps de travail comme ils le souhaitent.”

Frais d’installation et de gestion réduits

Au-delà de ces questions d’agilité et de productivité, la franchise est également et surtout un moyen de réduire ses coûts. “C’était un moyen d’optimiser la mise en place de mon activité, pour des raisons de praticité, de coût et de gain de temps, justifie Jimmy Béteau. C’est moins cher que de louer ou acheter un local.” L’intérêt financier de la franchise à domicile constitue ainsi la première motivation. “Il n’y a aucun investissement à faire pour l’emplacement commercial : pas de loyer, pas d’assurance, pas de mise aux normes, pas de décoration, pas de stock. Et les frais de gestion sont réduits à leur plus simple expression. On peut ainsi répartir la marge de façon plus confortable”, détaille Michel Kahn, dirigeant de Michel Kahn Consultants et président de l’Iref (fédération des réseaux européens de partenariat et de franchise). Le coût du pas-de-porte, du bail commercial, de l’aménagement et de tous les frais d’installation afférents étant épargné aux franchisés, le concept est rendu beaucoup plus accessible par des charges d’exploitation minimes et une meilleure rentabilité mensuelle. “Les franchisés ont moins de charges, donc moins de besoins [en trésorerie] et au final moins de pression”, souligne Jean-Charles Pédrono.

“La franchise à domicile permet d’assurer le démarrage en limitant les frais fixes” confirme Jimmy Béteau. En témoigne l’enseigne Raison Home, accessible avec un apport de 10 000 à 15 000 euros pour un investissement global de 60 000 euros, contre 50 000 pour 350 000 euros d’investissement global pour l’enseigne Mobalpa, qui fait également des agencements sur mesure.

Autre point positif, le gain de temps. Exercer en tant que franchisé à son domicile permet de se lancer plus vite, d’économiser le temps de trouver un local et de le mettre aux normes et aux couleurs de l’enseigne, mais aussi de gagner en temps de déplacement. Une praticité que loue Jimmy Béteau : “habitant en pleine campagne, je peux travailler efficacement à cinq minutes de mon petit-déjeuner. Et si j’ai besoin de vérifier quelque chose dans mon travail sur un temps personnel, je peux y accéder facilement.”

Développer sa visibilité

Au quotidien, la majeure partie de son travail se fait à domicile – Jimmy Béteau avait pris l’habitude bien avant le covid de coacher ses clients par Zoom. “Je suis très à l’aise avec le travail en distanciel”, confie-t-il. La généralisation du travail à distance lui a cependant “ouvert certaines portes”. “Je me suis retrouvé avec un marché cible plus abondant, avec des chefs de TPE ou de PME qui se sont mis à utiliser les outils digitaux. Si les clients n’ont pas besoin de se déplacer, c’est plus pratique pour eux”, insiste-t-il. David Borgel, fondateur du cabinet conseil Franchise Me Up, le confirme : “la visio a transformé le monde de la relation. Plutôt que de traverser une ville pour aller voir un client, on privilégie dorénavant le digital”. S’il n’est pas plus difficile de trouver des clients sans avoir de local, il faut néanmoins aller vers eux. Comme il ne dispose pas de l’effet marketing immédiat du point de vente fixe devant lequel on passe tous les jours, le franchisé doit d’autant plus prospecter, démarcher sur le terrain, développer son relationnel et sa visibilité. 

Jimmy Béteau explique ainsi qu’il passe la moitié de son temps en déplacement pour entretenir son réseau, se faire connaître, prospecter de nouveaux clients et développer la notoriété d’ActionCoach. Il s’occupe notamment de plusieurs groupes de BNI (Business Network International), spécialisé dans la recommandation d’affaires. “J’ai intégré différentes associations comme BNI ou la fédération Dirigeants commerciaux de France, pour rencontrer des dirigeants et je participe à un maximum d’activités collectives, événements ou remises de prix.” Il s’est également rapproché de groupements professionnels – CPME et CJD – pour rencontrer d’autres chefs d’entreprise. Objectif ? Lui ouvrir des portes et enclencher des relations qui aboutiront éventuellement par la suite à des contrats commerciaux. “Si un dirigeant reçoit un courrier d’un inconnu, ce message ne va pas enclencher une mission de coaching”, justifie-t-il.

Incontournables réseaux professionnels

Le franchisé développe également des partenariats et des parrainages avec d’autres entreprises qui ont les mêmes clients mais pas les mêmes activités pour lancer des ateliers découverte et des conférences thématiques et faire découvrir le coaching d’affaires. Pour compenser l’absence d’agence physique, Raison Home (120 franchisés) confirme qu’il faut être très présent dans les réseaux professionnels et prendre part à des rencontres institutionnelles. Ses franchisés participent ainsi aux apéros business dans les mairies. “Il faut des franchisés qui aiment aller au-devant des autres ! Nos franchisés doivent être connus et reconnus dans leur secteur, notamment des commerçants de leur ville, qui sont de bons prescripteurs.” Outre les réseaux sociaux qu’elle investit massivement, l’enseigne mise beaucoup sur la recommandation et le parrainage. “Huit projets sur dix viennent de la recommandation ou de la prescription, car nous accordons une place très importante à la satisfaction du client” soutient Jean-Charles Pédrono. Plutôt que d’attendre dans une agence que le client vienne à eux, les franchisés du réseau vont à la rencontre de futurs clients et profitent de leur temps libre pour prospecter. C’est ainsi qu’a démarré Claude Raison, à l’origine du concept, ayant délaissé son magasin pour aller chez le client. “Pris entre son magasin et les clients, il a choisi dans les années 1990 de fermer son point de vente pour ne plus subir les contraintes d’ouverture et être libre de se rendre chez le client, explique le responsable développement. Étant donné que nous fonctionnons par recommandation, nous n’avons pas besoin d’avoir autant de nouveaux clients qui toquent à notre porte. Selon nous, c’est le meilleur moyen de faire notre métier.”

Franchise nomade

Autre avantage de se rendre directement chez les clients, “pouvoir créer l’enchantement et proposer des projets qui vont au-delà de leurs attentes. Quand on est en magasin, c’est impossible. Il faut aller chez le client, voir comment il vit et comprendre ses besoins et ses contraintes. On est alors plongé dans l’univers du client, qui est en confiance”, relève Jean-Charles Pédrono. David Borgel confirme la nécessité d’aller à la rencontre des clients : “dans de nombreux métiers, le contact en face à face est très important. Les particuliers y sont sensibles, car l’information fournie semble plus juste, plus réelle et de meilleure qualité qu’avec un service à distance”.

En témoignent la création de franchises mobiles comme Ecowash, réseau de services automobiles, dont le lavage écologique et durable en entreprise et à domicile, ou Relaxauto, qui propose entretien et réparation automobile à domicile. “Ils n’ont plus de garage mais seulement des camions mobiles tout équipés qui vont chez les clients” poursuit David Borgel. La franchise nomade permet ainsi de se lancer sans point de vente fixe, mais avec une simple unité mobile, type camion ou vélo, et donc un investissement de départ minime.

“Avoir des unités mobiles coûte beaucoup moins cher et permet de véhiculer la marque dans le paysage commercial”

L’avantage ? La possibilité de se positionner là où est le marché et là où le client se trouve. “Avoir des unités mobiles coûte beaucoup moins cher et permet de véhiculer la marque dans le paysage commercial, donc de se faire connaître, de créer des effets de levier en matière de communication et de visibilité indirecte. Cette action publicitaire en continu capitalise sur la marque sept fois plus vite qu’un point de vente physique”, estime Michel Kahn. Ce principe évite la concurrence directe avec ses homologues. Le modèle engendre des positionnements uniques grâce à des concepts différents, innovants, et par définition modulables.

De la même manière, ces réseaux aident leurs franchisés à développer leur clientèle. Ecowash leur propose ainsi une permanence avec un centre d’appels et des outils marketing d’acquisition de clients, et assure une partie de leur chiffre d’affaires grâce à l’apport de grands comptes et de contrats nationaux. Enfin, ne pas avoir pignon sur rue doit être pallié par un maximum de communication sur Internet et les réseaux sociaux pour rassurer les clients potentiels. “Mieux vaut avoir un bon budget communication qu’un local commercial mal placé. S’ils investissent ne serait-ce qu’un quart du montant d’un loyer dans la communication en ligne – Google Adwords ou n’importe quelle technique d’acquisition de leads –, ils seront quasi sûrs d’obtenir le même résultat que s’ils avaient un point de vente” conclut David Borgel.

Charlotte de Saintignon

Le Nouvel Économiste, 24/08/2023

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