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Nous avons évoqué lors d’un précédent volet les événements qui pouvaient inciter un partenaire à retarder le paiement de ses factures (redevances d’exploitation, redevances de communication, achats mandatés, formations…) à la tête de réseau. 

Nous expliquions qu’il était primordial que l’équipe d’animation détermine rapidement si l’impayé faisait suite :

  • A un impayé sans arrière pensée : un problème avec sa banque, une négligence ou une absence de son comptable, un bug informatique, la perte de la facture, ou tout simplement un oubli de la part du partenaire. 
  • A une tension ponctuelle de trésorerie : Un investissement supporté sans emprunt bancaire, une échéance fiscale insuffisamment anticipée, un litige avec un prestataire ou le retard de paiement de l’un de ses propre clients. Dans ce cas, l’animateur réseau proposera au partenaire :
    • La signature d’un moratoire.
    • La mise en place d’un outil de pilotage de la trésorerie
    • De se rapprocher de son expert comptable
  • A un réel malaise qui incite le partenaire à enclencher un « bras de fer » pour faire entendre son mécontentement auprès de la direction du réseau. 

Ayant évoqué les aspects opérationnels de gestion de ces incidents de paiements, nous proposerons ici des conseils et méthodologies que pourraient mettre en place les services back office (comptabilité et juridique), afin d’appuyer leurs collègues.

  • La constitution d’un « comité des risques » favorise les prises de décisions collégiales sur les suites à donner aux incidents de paiements et litiges dans le réseau. Ce comité est composé du contrôleur de gestion (en charge du suivi des retards de paiements des partenaires), du juriste ou de l’avocat ayant rédigé le contrat de franchise  (trait d’union entre le plan d’action des opérationnels et la faisabilité technique dans les clauses du contrat de partenariat) ainsi que du directeur régional. Réunis en sessions mensuelles, ils décident des actions à mener pour piloter et anticiper la dégradation des partenaires du réseau.
  • Implémenter des outils de reporting réguliers.
  • le scoring de prévention de la défaillance qui permet d’identifier les points de vente en risque à mois de 3 mois, 6 mois et 12 mois. Réalisé à partir de critères concrets (paiement par chèque ou par prélèvement, retards réguliers supérieur à 30 jours, paiement avant livraison exigé par les autres fournisseurs référencés, moratoire déjà mis en place, note qualité, litiges clients…), cet indicateur accentue la vigilance sur une partie de partenaires identifiés « à risque ».
  • le suivi de la bad debt : Au lendemain de chaque échéance (par exemple le 6 du mois si les royalties sont prélevées le 5), le contrôleur de gestion franchise adresse à chaque animateur un tableur reprenant les incidents de paiements des franchisés de sa zone. Dès réception, l’animateur contacte ses partenaires défaillants afin d’obtenir une régularisation immédiate. Au delà de l’aspect recouvrement de créance qui aurait pu être directement réalisé par le service comptabilité, cette conversation permet à l’animateur d’avoir un échange direct sur un sujet sensible (la trésorerie de l’exploitation de son partenaire). Ce dernier lui dévoilera son niveau de satisfaction ou de mécontentement : C’est le baromètre du réseau.
  • La remontée d’information de l’animateur qui indique au service comptabilité les motifs évoqués par son partenaire. Il est possible qu’une facture de soit pas due (avoir en attente, erreur sur le montant facturé, échéance modifiée,…). Si ce retard de paiement est justifié, le service comptable devra résoudre le litige avant de déclencher le process de recouvrement. 
  • La segmentation des partenaires. Il ne s’agit pas seulement de ranger des profils dans des cases mais d’identifier des comportements similaires qui conduisent aux mêmes constats afin de prévoir les actions à mettre en place avant qu’elles ne s’imposent tardivement. Cette segmentation peut se construire rapidement via un tableur afin de pouvoir visualiser sur un axe abysse – ordonnée les groupes de partenaires. Nous proposons ci-après une liste non exhaustive des éléments à mesurer : la confiance dans la relation, la progression du chiffre d’affaires et du nombre de clients, le taux de satisfaction client, la note qualité, la participation à la vie du réseau, le délai de mise en œuvre des nouveautés, la formation des équipes…).
  • Le processus de recouvrement :
  • A J+3 : Trois jours après ce premier appel de l’animateur, le contrôleur de gestion réseau adresse un e-mail (ou courrier) de relance au partenaire dans lequel il lui demande de régulariser sa situation sans délais. Relance accompagnée d’une situation comptable à jour, en pièce jointe. Sans réactions (c’est-à-dire sans paiement), il est relancé par téléphone 10 jours après l’échéance initiale. A partir d’un nombre de partenaires significatif, il est conseillé de s’équiper d’un logiciel de recouvrement de créances et d’automatisation des relances.
  • A J+30, le compte à rebours s’accélère. La situation prend une mauvaise tournure. Plus le temps passe et plus le paiement s’éloigne. Premièrement car si le partenaire était disposé à régler sa dette, il aurait certainement déjà proposé une solution. Ensuite, parce qu’une deuxième échéance pourrait se cumuler à notre impayé et augmenter la dette initiale.

Le directeur du réseau, qui jusqu’à maintenant s’est montré discret pour laisser la légitimité de ses équipes opérationnelles, doit intervenir. Un appel téléphonique, une convocation au siège, voir un déplacement sur le point de vente du partenaire doit avoir lieu. Le patron du réseau doit être l’écoute de son partenaire mais doit aussi se montrer ferme sur le respect des échéances. Tout geste commercial de sa part doit être précédé d’un règlement du partenaire.

En parallèle, le service comptabilité qui a déjà adressé un e-mail (ou courrier) de relance, suivi d’un appel téléphonique enverra une lettre de mise en demeure, avec notification des intérêts de retard, en courrier recommandé avec accusé de réception. L’objectif est triple :

  1. Agir crescendo pour faire comprendre au partenaire que le temps joue contre lui et que chaque étape du recouvrement obéit à un processus d’escalade qui l’entraine vers une mise au contentieux.
  2. Permettre à l’animateur ou au directeur de réseau de jouer le médiateur entre son partenaire et sa direction financière et juridique qui applique un schéma de recouvrement organisé.
  3. Communiquer vis à vis des autres membres du réseau souhaitant imiter leur confrère en retardant le règlement de leurs échéances. Les membres d’un réseau communiquent entre eux, tout se sait : les aides financières que vous avez accordé à l’un, les abandons de créances concédés à l’autre… Une attitude souple sera vécue comme une opportunité par certains afin d’obtenir facilement la trésorerie qu’il n’obtiennent pas via leur exploitation.

Après l’étape de mise en demeure, c’est le service juridique qui prend le relai. Il peut envoyer des injonctions de payer, mandater des huissiers, faire jouer la clause résolutoire, remettre le dossier à l’avocat… On s’approche petit à petit d’un arbitrage ou d’un procès au tribunal de commerce (en fonction des clauses du contrat).

L’opérationnel n’a plus la main. Le point de vente risque de fermer Au mieux, il sera cédé à un nouveau partenaire ou repris en portage par la tête de réseau, qui connaît le coût d’une nouvelle ouverture à cet emplacement.

C’est pourquoi, il n’est pas rare de voir le dossier atterrir sur le bureau du directeur général qui s’interroge, en bon visionnaire, s’il ne vaut mieux pas aplanir la dette et repartir sur de bonnes bases avec ce partenaire.

Cette réflexion sera abordée dans un prochain volet qui traitera des impacts économiques et psychologique pour le réseau qui devra arbitrer en fonction :

  • des coûts de fermeture d’un point de vente (dépôt d’enseigne, image du réseau, maillage, impact sur le DIP et sur les nouveaux candidats…) ; 
  • des coûts d’une réouverture dans la même ville (recrutement d’un nouveau partenaire, recherche d’un local commercial sur la même zone, formation initiale du candidat, reconquête de la clientèle passée à la concurrence…) ;
  • et, du manque à gagner résultant de l’entre deux (absence de redevances, impact sur les volumes d’achat du réseau, remises fournisseurs, moral des partenaires dans la même situation…).

David BORGEL

06.11.19.18.44

dborgel@franchisemeup.com

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